La généalogie c’est bien. Mais ça nous transforme
un peu… Quand le généalogiste est en société, il est alors l’objet de
curiosité, entre fascination et répulsion.
L’an dernier mon frère s’est marié et j’ai été
son témoin. Ravi du mariage et d’être choisi pour témoin, il m’est quand même
venu une pensée bizarre que je ne partage qu’avec vous, chers lecteurs. J’allais
signer sur un acte de mariage.
Oui. J’allais être témoin.
Et j’ai pensé à ces générations futures qui,
faisant de la généalogie, me noteraient en témoin de mariage. Du coup, quand j’ai
signé, en mairie et à l’église, j’ai fait une belle signature pour la
postérité.
Si je dis ça à mon frère, pour qui la généalogie
est la lubie de son frère, il va me regarder étrangement, lever un sourcil
puis, après hésitations, me dire : « Hein ? J’ai rien compris. »
Car nous sommes bizarres. Les généalogistes sont
bizarres.
Les gens normaux, quand vous dites que vous
faites de la généalogie, vous posent des questions comme :
« T’es remonté jusqu’où ? »
« Tu descends de Jeanne d’Arc ? parce
que moi, oui »
« T’es noble ? »
« Pourquoi tu fais ça ? Tu veux hériter
de quelqu’un ? »
« C’est quoi l’intérêt ? »
« Et sinon, tu peux me passer le sel ? »
Et faut surtout pas répondre sérieusement. Ni se
moquer. Ni bouder. Dans l’idéal, faut prendre un air détaché et dire que c’est
un passe-temps, que non, c’est une légende j’ai pas de blog.
Ou dire, sur un ton hipster : « oui, je
m’intéresse à l’anthropologie familiale à l’époque moderne, aux systèmes d’alliance
en zones rurales et urbaines ; d’ailleurs, tu savais que tatie Ursule
était née à Roquefort-la-Bédoule et pas à Althen-les-Paluds ?!!! Dingue
hein ! C’est qui ? Euh… »
C’est la raison pour laquelle cet article me
semble important. Donner les clés au généalogiste pour interagir avec le Monde
Normal, celui des non-initiés.
Faut être compréhensif. Quand l’oncle Ernest vous
parle de sa passion pour les sifflets imitant tous les oiseaux, dont la Talève
sultane ! et que vous levez les yeux au ciel en priant pour être foudroyé,
il faut vous dire que vous pouvez avoir le même effet sur les autres, y compris
tonton Ernest !!
D’où quelques conseils, à suivre pour votre
propre sécurité.
1. Si on vous pose une
question sur la généalogie, pensez que la personne en face a peut-être une curiosité
limitée.
Si au bout d’un quart d’heure, vous répondez
toujours à la question et que votre interlocuteur a un regard vide, arrêtez-vous
immédiatement. Même si vous êtes au milieu d’une phrase car de toute façon,
personne écoute. Si l’autre sourit et vous répond « c’est intéressant »,
surtout, surtout !!, ne pensez pas que ça veut dire « dis m’en plus ».
2. Si on ne vous pose pas de
question sur la généalogie, n’y répondez pas.
Ca paraît absurde, mais non. Ou peut-être. Enfin,
bon…
3. Tout sujet de discussion
n’est pas l’occasion de placer une anecdote généalogique.
Ainsi, si votre interlocuteur a passé de
ravissantes vacances à Locmariaquer, inutile de préciser qu’une cousine au 7e
degré y a vécu de 1726 à 1729 et de raconter ensuite toute sa vie, y compris
que la brave Perrine Leglouec s’est mariée avec son cousin et qu’il a fallu une
dispense de consanguinité du 3e au 4e degré, d’ailleurs
vous savez comment ça marche en droit canonique ? Je vais vous dire.
4. Photographier des tombes
pour sauvegarder le patrimoine, c’est bien. Attention de ne pas le faire au
moment d’un enterrement.
Tout est dans les deux phrases ci-dessus. Je
précise : même si c’est l’enterrement de la belle-mère, c’est pas une
raison.
5. Si on vous dit que la
généalogie c’est pour les vieux, que ça sert à rien ou autre, restez zen.
Pensez d’abord positivement, que vous êtes dans
la nature à l’ombre d’un majestueux arbre aux ramifications multiples. Puis…
non en fait, je conseille le crochet du droit. C’est un blog de généalogie ici,
je vais pas donner des conseils de survie pour les non-initiés ! Le temps
du dialogue viendra plus tard avec les échanges de politesse, La généalogie ça
sert rien, Parce que toi tu sers à quelque chose ?, Je suis ta mère !,
etc. Bref.
6. La généalogie étant une
passion old-school, rajeunissez-la.
Live-twittez l’atelier de paléographie du
vendredi, deuxième du mois, à la salle des fêtes de Beaumont-de-Pertuis.
Faites une vidéo avec des filtres Snapchat en
direct des AD avec l’archiviste. Je conseille la licorne qui vomit de l’arc-en-ciel.
Partagez sur Facebook cet article. C’est pour
vous que je dis ça.
Si vous allez dîner chez vos parents, restez sur
votre téléphone pour échanger des messages blasés avec vos potes généalogistes
sur WhatsApp « J’suis chez les parents. Trop la lose. Vivement qu’j’me
casse. T’es dispo ce soir ? Sérieux, ça s’rait cool qu’on se fasse une
soirée mise à jour des sources Hérédis »
En somme, suivez ces conseils pour votre propre
bien-être. Ou alors, faites ce que vous voulez, à vos risques et périls !
Si vous avez des suggestions pour le Guide de
survie, n’hésitez pas à les partager en commentaire, ici ou ailleurs, ou par
télépathie si vous aussi vous êtes blasés d’écrire parce que franchement,
écrire ça fait tellement 2014, c’est mieux YouTube.
Merci de m’avoir lu et à très vite pour un autre
article futile à votre survie !